samedi 16 août 2008

Menace de coup d'Etat en Bolivie...silence des médias!


Sauf à considérer que vous vous intéressez de près à la situation politique de l'Amérique Latine et aux différentes tentatives de redorer le blason du terme de démocratie, qui dans nos contrées n'en constitue plus guère qu'un parangon, vous n'avez certainement pas entendu parler de la remise en cause de son mandat, par Evo Morales en bolivie le dimanche 11 août, celle-ci a été effectuée par voie référendaire et le président bolivien a remporté 63% des voix, davantage encore qu'en décembre 2005.

Nous pourrions nous demander ce qu'a motivé ce référendum tout comme nous pourrions nous demander pourquoi NS n'en fait pas autant si la réponse à cette dernière question n'était pas si tristement évidente.

Il convient de rappeler que depuis l'indépendance de ce petit pays en 1825, son importance onomastique a pris tout son sens, le rédacteur de sa première constitution (Simon Bolivar, figure emblématique de toutes les velléités d'indépendance en Amérique Latine)lui a donné son nom, ce théoricien visionnaire qui désignait déjà les Etats-Unis comme l'ennemi auquel il faudrait s'arracher...
Force est de constater que pas moins de 180 coups d'Etats ont été fomentés par Washington et la CIA depuis lors, toutes les réformes à caractère social ont été mises à mal par l'ingérence de Washington.

Il suffit de penser au sort de Victor Paz Estenssoro et du MNR (Movimiento Nacionalista Revolucionario) qui en 1951 se voit dérober une victoire électorale par l'armée, lorsqu'en 1952, il lance une révolution, c'est pour demander de nouvelles élections, celles-ci lui permettent d'accéder au pouvoir. Il instaure alors le suffrage universel, redistribue les terres du pays (2 août 1953), améliore l'éducation de la population rurale, et nationalise les plus grandes compagnies minières du pays. Mais il est renversé par une junte militaire en 1964, laissant place à une succession de gouvernements faibles et d'Etats Militaires (Mesa, Lozada...)
Il faudra attendre décembre 2005 pour que le premier président indien soit élu à 54%, Evo Morales lance une 3ème nationalisation des hydrocarbures et s'inscrit en droite ligne de la politique sociale de Chavez, ceci est accompagné d'une occupation des champs pétrolifères, spécialement dans le sud du pays, dans le département de Tarija... et bien évidemment, le gouvernement de Washington attend depuis le moment opportun pour déstabiliser le gouvernement.

En mai 2008, un prétendu référendum d'"auto-determination" dans la région de Santa Cruz(derner bastion de l'oligarchie qui concentre une bonne partie des ressources économiques du pays) celui-ci devait permettre de diviser le pays en s'appuyant sur la volonté sécessionniste de la région par rapport au gouvernement central et entraîner ainsi une inévitable guerre civile.

Les plus grands spécialistes se sont alors insurgés et ont dénoncés cette situation dans une pétition (dont Adolfo Pérez Esquivel, Rigoberta Menchú, Noam Chomsky, Ignacio Ramonet...) dénoncaient « la conspiration pour diviser la Bolivie » et appelaient à « soutenir le Président Evo Morales ».

Extrait de cette pétition: « en Bolivie, le processus de changements pour les majorités court le risque d’être brutalement restreint. L’arrivée au pouvoir d’un président indigène, élu avec un soutien sans précédent dans ce pays, et ses programmes de bénéfice populaire et de récupération des ressources naturelles, ont dû affronter dès les premiers moments les conspirations oligarchiques et l’ingérence impériale.
Récemment, l’escalade conspirative a atteint ses niveaux maximaux. Les actions subversives et anticonstitutionnelles avec lesquelles les groupes oligarchiques prétendent diviser la nation bolivienne, reflètent la mentalité raciste et élitiste de ces secteurs et constituent un très dangereux précédent, non seulement pour l’intégrité de ce pays, mais aussi pour celle d’autres pays de notre région..."

Preuve s'il en était besoin du brouillage médiatique qui sévissait alors et qui continue aujourd'hui de passer sous silence une situation des plus critiques, une véritable épée de Damoclés est prête à s'abattre sur la Bolivie et il ne tient qu'à nous de soutenir le choix du peuple bolivien qui sait bien, lui, où sont ses intérêts, il ne tient qu'à nous de dénoncer cette politique conspirative pour que l'élan démocratique et social en Amérique Latine ne soit pas réduit à un coup d'épée dans l'eau (pour filer la métaphore).
Morales joue donc le quitte ou double, en misant sur le large soutien dont il jouit chez les populations indigènes, paysannes et ouvrières. L'autre chemin, celui de la négociation avec les préfets radicaux de la dénommée "Demi Lune", des départements de Beni, Pando, Tarija et Santa Cruz, ayant échoué.

Des réferendums pour l'autonomie ont été organisés dans ces régions sans observateurs nationaux ni internationaux, même l'OEA (qui n'est pourtant pas connue pour son penchant progressiste n'a pas envoyé d'agent). Ces réferendums déclarés illégaux par la CNE (Cour Nationale électorale) se sont soldés par une abstention massive des masses ouvrières et paysannes soutenant l'unité constitutionnelle de la Bolivie, et ce malgré la réunion des forces d'extrême droite tel que la Unión Juvenil Cruceñista de Santa Cruz.

Morales dérange à plus d'un titre et il n'est pas étonnant de voir que les médias européens taisent les agissements de l'ambassadeur américain Goldberg et évitent de parler du rôle de l'extrême droite dans la menace de coup d'Etat qui plane au dessus de la Bolivie,( il suffit, pour s'en convaincre de jeter un oeil sur la lettre ouverte d’Evo Morales, à propos de la "directive retour" de l’Union Européenne le 15 juin 2008 (www.legrandsoir.info/spip.php?article6789

Alors restons vigilant et soutenons tous les efforts faits pour que le terme de démocratie cesse d'être galvaudé et souvenons-nous qu'oublier l'histoire c'est se condamner à la revivre.
Voilà ce que rappelle très justement le grand spécialiste belge de l'Amérique Latine à propos de l'ambassadeur des Etats-unis:
"Pourquoi a-t-on exporté Goldberg des Balkans à la Bolivie ? Pour transformer, j’en suis sûr, ce pays en une nouvelle Yougoslavie. Le séparatisme est une méthode privilégiée par les Etats-Unis pour reprendre le contrôle de richesses naturelles ou de régions stratégiques lorsque des gouvernements se montrent trop indépendants, trop résistants aux multinationales."

N'oublions pas non plus l'existence d'une base militaire des Etas-Unis au Paraguay installée après le 11 septembre 2001 pour lutter contre... contre quoi au juste?