jeudi 3 novembre 2011

Hernando Calvo Ospina : l'acuité du regard et la force de l'engagement!" Tais-toi et respire!"

Hernando Calvo Ospina, journaliste et écrivain, collaborateur du Monde Diplomatique, s'est toujours interessé à la question des cooptations entre le pouvoir politique et la vénalité sans limite des néo-libéraux de tous acabits. Son livre "L'équipe de choc de la CIA" est une des enquêtes les plus riches sur la formation de cette équipe dans l'immédiat après guerre et ses activités tout au lon de la fin du XXème siècle jusqu'à nos jours.

Doté d'un solide sens de l'investigation et fort de plusieurs années d'expérience, Hernando Cavo Ospina nous entraîne dans les méandres de l'histoire, celle que la Maison Blanche à tout fait pour tenir secrète. Les archives déclassifiées conservent leurs zones d'ombres et les "caches" qui s'y trouvent encore sont là pour en témoigner. Le lecteur sans même s'en apercevoir, entre dans une trame romanesque qui n'a hélas rien de fictive. Toute faite de complots, d'espionnage, de contre-espionnage, de guerres sales, de porteurs de serviettes, d'avions remplis de drogue, ce sont les dessous d'une Agence qui a bien profité de ce que Naomie Klein appelle "les situations de choc".

Depuis le Coup d'Etat en 1954, contre le dernier homme politique de gauche à avoir tenté une poltique sociale au Guatemala, Jacobo Arbenz,jusqu'à la première guerre d'Irak, les exactions commises par les mercenaires et terroristes employées en sous-main par la CIA en Libye, en Afghanistan et ailleurs, en passant par le Watergate et l'Irangate, tout est passé sous le fine lame du journaliste. Une attention particulière est portée sur le rôle décisif du clan Busch.

"L'équipe de choc de la CIA" est probablement l'une des trois plus grandes références en la matière, avec les mémoires de Bill Collby, ancien responsable de la CIA jusqu'en 1976 où Bush père lui succéda, et "Le livre noir de la CIA". Bill Collby avait coordonné l'opération Phénix au Viet-Nam qui avait causé des milliers de morts. Considéré par Donald Rumsfeld et Dick Cheney comme un "tendre", ses mémoires ont fait trembler les murs des bureaux de la CIA.

La lumière se porte également sur les circonstances de la mort du Che, les zones d'ombre dans l'assassinat de Kennedy, le financement des Contras au Nicaragua...

D'une rigueur exemplaire et très bien documentée, ce livre réjouira tous ceux qui exige la vérité sur des moments-clés de notre histoire récente.
Tais-toi et respire!

Hernando Calvo Ospina projette la publication d'un livre beaucoup plus personnel,"Tais-toi et respire", soutenu par Jean Ziegler, sur la torture dans les geôles équatoriennes. Il fut enlevé en septembre 1985 par l'"Intelligence militaire colombienne" car il était soupçonné d'être en relation avec les guerillas de ce pays. Arrêté, torturé, il passa près d'un trimestre en prison, le pire de son existence. Dans un texte sobre, plein d'humour, il raconte son histoire, ces longs mois de combat qui l'ont marqué au fer rouge et les méthodes employées encore aujourd'hui en divers endroits du monde, où l'Homme trouve en lui les ressources nécessaires à la lutte contre les opressions barbares d'un système prêt à toutes les ignominies pour sacraliser sa domination. La plume contre l'enclume du cauchemar!

"Ceux qui m'ont fait ça sont aujourd'hui en prison, le pays a changé, quant à la Colombie, il reste l'Etat le plus assassin du monde".

Hernando Calco Ospina fait aujourd'hui partie de la "no fly list", c'est-à dire qu'il n'a pas le droit de survoler le sol américain, il en a fait l'amère expérience il y a quelques années.

Mais il y a encore pire, précisions dans une prochaine note!

Ce livre auto-financé, a besoin de ses futurs lecteurs et lectrices pour voir enfin le jour en Mars 2012, à tous ceux qui veulent aider cette noble cause et participer à ce beau projet,
écrire à :

Clae, 26, rue de Gasperich

L- 1617 Luxembourg, 00 352 29 86 86-1, migrations@clae.lu.

jeudi 13 mai 2010

Réflexions sur le néo-libéralisme "L'encerclement"




Le titre du documentaire de Richard Brouillette " L'encerclement - Le néo-libéralisme dans les rets de la démocratie" pourrait faire penser qu'il traite de la fameuse théorie du complot, dernier faux argument que nous renvoient ceux qui n'en ont pas, sitôt que l'on prend du recul pour une vision générale de la politique économique. Il n'en est rien. Le sujet de ce documentaire est d'analyser les différents mécanismes de l'idéologie néo-libérale, les étapes successives de son instauration et les moyens employés pour sa subtile imprégnation dans « l'ennui gris et mou du cerveau » dont parlait L.F.Céline.

Le documentaire débute par les origines du néo-libéralisme, ses deux actes fondateurs que sont le colloque Walter Lippman (1938) et la fondation de la Société du Mont-Pélerin (1947) et finit sur l'idée d'un néo-colonialisme basée sur l'exemple éloquent de la guerre en Bosnie.

Pierre Bourdieu (1)voyait dans le système de pensée néo-libérale une « méthode de destruction méthodique du collectif », c'est-à-dire une pensée que l'on nous présente comme ahistorique, qui ne prend pas en compte les réalités socio-économiques et qui s'auto-justifie en permanence. De là vient la mythe du Marché-roi capable de s'auto-réguler, non pas simplement en se passant de l' État providence mais en détruisant la protection des États nationaux au profit des entreprises transnationales et des capitaux étrangers.

Pour ce faire, la logique néo-libérale s'attache l'adhésion des acteurs de la vie politique économique, les actionnaires, les acteurs financiers, les conservateurs ou sociaux-démocrates de ce début de XXIème siècle, désireux qu'ils sont de défendre leurs intérêts individuels et de participer à l'atomisation de l' État. Ce que Ignacio Ramonet(2) a nommé la pensée unique laisse voir en filigrane l'enrayement d'une pensée capable de la contrecarrer.

L'accroissement tentaculaire de cette « non-pensée », de l'idée du tous contre tous a permis par exemple à ses théoriciens tels que Milton Friedman de gangrener l'économie chilienne de S. Allende, de conduire à la faillite d'un État, de soumettre totalement un pays aux investissements étrangers et d'instaurer ce que l'un des participants, Michel Chossudovsky, nomme « le néo-colonialisme ».

Les canaux de diffusion du néo-libéralisme sont les grands médias internationaux appuyée par la Commission Creel (3) (fondée pendant la Première guerre mondiale aux Etats-Unis pour motiver le peuple américain majoritairement pacifiste à s'engager dans la guerre), la propagande directe de la publicité qui noient les esprits, mais il existe également des réseaux tentaculaires plus insidieux :


• Les think tanks désignaient en période de guerre l'endroit où se réunissait l'Etat-Major pour établir des stratégies de combat. Aujourd'hui,ce sont des « cellules de réflexion »où se réunissent des experts pour se pencher sur des questions concernant les politiques publiques. Naomi Klein dans son livre « La stratégie du choc » parle de ces réseaux comme l'instrument de ce qu'elle appelle le « capitalisme du désastre » et de leur intérêt dans les stratégies de guerre. En effet, Les think tanks sont de formidables réseaux d'endoctrinement comme le rappelle Noam Chomsky dans son livre « la fabrication du consentement »(4)

• Les politiques d' Éducation dont la priorité n'est plus l'enseignement et la transmission du savoir mais la rentabilité et la formation professionnelle au service des entreprises, cette logique économique dont la notion de compétence en lieu et place de savoir, la réforme des programmes d'histoire au collège, celle des lycée, la masterisation des filières d'enseignement en France ne sont que quelques uns des paliers de l'échafaudage. Omar Aktub évoque sans ambages l'idée qu'aujourd'hui l'Ecole sert à former des « serviteurs du système », employable et ajoute que Socrate, Victor Hugo ou Rimbaud n'auraient pas été « employable ». Normand baillargeon, lui, parle du système éducatif des Etats-Unis et du Canada où il existe des logiciels pédagogiques pré-fabriquées dont peuvent disposer les enseignants et les élèves... truffés de publicités.


Le documentaire tourné en noir et blanc n'est pas pour autant construit sur l'échiquier mental du manichéisme, nous contre eux, les bons contre les méchants. Il présente justement les voies par lesquelles le néo-libéralisme se sert de nos peurs, de nos indifférences, de notre sentiment d'impuissance et du cadre démocratique pour nous confondre tout à fait et nous aveugler dans sa mythologie. Le choix du réalisateur a été de donner la parole à des intellectuels, des penseurs de gauche ou de droite, sans recours aux images d'archives, ce qui rapproche le documentaire du débat d'idée indirect, propice à l'éveil de l'esprit critique.

La présence d'Ignacio Ramonet, de Noam Chomsky, de Normand Baillargeon, de Susan George etc... se voit mise en valeur par les billevesées et les inepties prononcées par des intervenants tel que M. Masse à qui la parole est donnée (Consultant en politiques publiques au Québec) avec sa notion de « libertarianisme » et sa désopilante métaphore de la rivière...

« L'encerclement » est un documentaire édifiant à bien des égards, notamment parce qu'il a une volonté didactique dans sa structure-même, les intervenants vont au bout de leurs idées, un choix de réalisation qui explique la durée (2h45) et la légitime, car on ne s'ennuie pas un instant malgré la densité intellectuelle, rien de pompeux, pas de fioritures. On sort de la projection avec la satisfaction de ne pas avoir été pris pour des idiots et cela fait du bien par les temps qui courent.

NB : Ce documentaire ne passe que dans quelques salles alors, courez-y!
Pour en savoir plus, visiter le site de "l'encerclement"

Notes :

1 http://www.monde-diplomatique.fr/1998/03/BOURDIEU/10167

2 Ancien directeur du monde diplomatique et l'un des fondateurs de l'association Mémoire des luttes

3 http://olivier.hammam.free.fr/imports/auteurs/normand/cours1.htm

4 « La prédominance des sources officielles[...]est contrôlée grâce à la cooptation des experts, c'est à dire en les rémunérant comme consultants, en finançant leurs recherches, en organisant des think tanks qui les emploieront et aideront à diffuser leur message »
Noam Chomsky, Edward Erman, De la fabrication du consentement - de la propagande médiatique en démocratie,, Ed. Agone, 2008

vendredi 16 avril 2010

Résister bordel, RESISTER!


Keny Arkana > Autre Monde Possible
envoyé par niconues. - Films courts et animations.


Keny Arkana > Autre Monde Possible
envoyé par niconues


Nous sentons bien que ce qui était prévisible point doucement au dessus de l'horizon, un soleil noir, spectral. Le mur se rapproche inéluctablement et l'on continue de s'étrangler à trop entendre les sempiternelles réponses des fatalistes, de ceux qui pensent qu'on ne peut rien contre cette forme de mondialisation parce qu'elle est, en substance, "la marche du monde"... Aussi intéressante que fut la démarche cioranesque pour comprendre les affres de l'héroisme négatif moderne, elles n'est pas soutenable car l'autodestruction, aujourd'hui n'est ni consciente ni pensée, Cocteau disait que le problème du XXème siècle c'est que "la bêtise pense", non elle ne pense pas elle mouline, s'engouffre et succombe.

Résister parce que sinon, qu'est-ce qu'on est au juste?

Des morts en sursis, prêts à la pourriture, à la décomposition mentale, un tas de viande où grouille la peur, l'impuissance...

Lorsque le FMI est capable de trouver des dizaines de milliards pour sauver les banques au moment où leur situation est critique et ne veut rien entendre au cri des peuples alors qu'il suffirait de 500 millions de dollars pour éviter que 1 milliard de personnes ne meurent de faim, on a comme un goût dégueulasse dans la bouche...

La grève générale se profile face aux injustices les plus notoires,contre cet ultra-libéralisme qui pour être individualiste est la négation même de l'individu.
Cette divinisation du fric dont parlait déjà F. Quevedo, aujourd'hui, tandis qu'elle réduit le tiers de l'humanité à l'état de "tube digestif" elle anéantie les deux tiers dans l'ignominie de la faim, rien d'étonnant alors à ce qu'à un moment ou à un autre les hommes se retrouvent enfin face à leurs semblables.

Prévert l'a bien dit: "Quelle connerie la guerre", qu'elle soit contingente, politique, militaire, financière ou tout cela à la fois, la seule réponse qu'elle mérite n'est pas l'opposition mais la résistance, la dénoncer ne suffit pas il faut s'organiser. Le seul acte capable de rendre à l'humain toute sa force et sa dignité.

Le texte programmatique de l'EZLN en 1997 a été publié dans le Monde Diplo en Août de cette année, il a aussi été envoyé aux journaux de tous les pays! Une petite analyse du Commandant Marcos qui perce à jour ce que d'aucuns considèrent encore comme une marche inexorable:

"Si la troisième guerre mondiale a vu l'affrontement du capitalisme et du socialisme sur divers terrains et avec des degrés d'intensité variables, la quatrième se livre entre grands centres financiers, sur des théâtres mondiaux et avec une formidable et constante intensité.

Grâce aux ordinateurs, les marchés financiers, depuis les salles de change et selon leur bon plaisir, imposent leurs lois et leurs préceptes à la planète. La " mondialisation " n'est rien de plus que l'extension totalitaire de leurs logiques à tous les aspects de la vie. Naguère maîtres de l'économie, les Etats-Unis sont désormais dirigés, télédirigés, par la dynamique même du pouvoir financier : le libre-échange commercial. Et cette logique a profité de la porosité provoquée par le développement des télécommunications pour s'approprier tous les aspects de l'activité du spectre social. Enfin une guerre mondiale totalement totale !

Quelques minutes suffisent pour que les entreprises et les Etats s'effondrent ; non pas à cause du souffle des révolutions prolétariennes, mais en raison de la violence des ouragans financiers.

Vers la fin de la guerre froide, le capitalisme a créé une horreur militaire : la bombe à neutrons, arme qui détruit la vie tout en respectant les bâtiments. Mais une nouvelle merveille a été découverte à l'occasion de la quatrième guerre mondiale : la bombe financière. A la différence de celles d'Hiroshima et de Nagasaki, cette nouvelle bombe non seulement détruit la polis (ici, la nation) et impose la mort, la terreur et la misère à ceux qui y habitent, mais elle transforme sa cible en simple pièce dans le puzzle de la mondialisation économique. Le résultat de l'explosion n'est pas un tas de ruines fumantes ou des milliers de corps inertes, mais un quartier qui s'ajoute à une mégalopole commerciale du nouvel hypermarché planétaire et une force de travail reprofilée pour le nouveau marché de l'emploi planétaire."

Un documentaire à voir de toute urgence: L'ENCERCLEMENT



A bon entendeur...

samedi 10 avril 2010

Chili - de la concertation à la consternation

CHILI - De la Concertation à la consternation



Le premier tour des élections au Chili montre s’il en était encore besoin, à quel point le pays traverse une période tumultueuse. Cette situation est née de la première alliance politique entre le Parti pour la Démocratie, une coalition de forces sociales libérales et démocrates chrétiennes qui a tenté de construire la transition démocratique post-pinochetiste.

Le Chili n’est évidemment pas sorti indemne de 30 ans de dictature mais pire encore, il s’est bâti sur les charbons ardents des crimes impunis pendant la dictature, du sentiment d’injustice du peuple chilien et sur une boue politique qui a dû composer avec un système pinochetiste trop bien ficelé. Les nœuds bureaucratiques et institutionnels avec, au premier chef, la Constitution votée sous Pinochet en 1980, mais aussi la continuité de la politique néolibérale avaient fait jusqu’à présent marquer le pas au progressisme de gauche au Chili. Aujourd’hui ils laissent craindre une régression politique et sociale d’envergure pour l’ensemble du peuple chilien par le retour au pouvoir d’une droite dure dont le leader est déjà surnommé le « Berlusconi chilien ».

Le second tour des élections présidentielles du 17/01/2010 marquera le peuple chilien qui, lui, a une très bonne mémoire. Donné vainqueur à 51,6, Sebastian Pinera, le candidat d’une droite néolibérale, a mené à bon port la « Coalition pour le changement » dont il était le chef de file. Le parcours de Sebastián Piñera est pour le moins atypique, le brillant homme d’affaire a fait fortune à la fin des années 70 sous la dictature de Pinochet, possédant une bonne partie de la chaîne de télévision « Chilevisión », un club de football et une compagnie aérienne (Lanchile) dont les actions auraient augmenté de 36% ces dernières semaines. Ses actifs s’élèveraient à près de 848 millions d’euros.

De plus, Il s’est bien gardé jusqu’en 1988 de s’exprimer clairement sur la nature de ses agissements pendant la dictature et pour cause, car même si cette année-là il a voté « non » à la pérennité au pouvoir de Pinochet, en 1995, il s’est prononcé en faveur de l’amnistie pour les crimes de la dictature se disant, par ailleurs, devenu un « humaniste chrétien » [1].

Le Chili baignait dans une « Concertación » depuis 20 ans qui a pavé la voie à la restauration d’une droite dure conservatrice, non seulement en ne faisant pas voter une nouvelle Constitution pour mettre à bas la constitution pinochetiste de 1980, mais aussi en ne tenant pas ses engagements sur des sujets aussi importants que le changement de modèle économique impliquant le retour de l’État. En effet, depuis le début des années 1990, le Chili s’est concentré sur l’accord de libre échange avec les États-Unis, assurant la néo-dépendance de l’économie chilienne à l’égard des entreprises multinationales.

En fait, l’échec d’Eduardo Frei avec 48,7% des voix est bien plus celle d’un conglomérat politique sans projet défini, ne parvenant pas à dissimuler derrière ses discours cent fois entendus, son lourd passif et son incapacité à la rupture avec la politique antérieure :

La domination politique, économique et militaire des États-Unis.
La mainmise des grandes multinationales sur les agences de presse et autres moyens de communication.
La criminalisation systématique des mouvements sociaux et populaires, syndicaux et étudiants.

Le comportement de la coalition laissait présager cet échec, en se débattant ainsi parmi les trahisons, le désordre politique, elle a fait preuve d’une lâcheté politique sans pareille sans compter son indifférence à l’égard du peuple Mapuche. Tout cela a galvaudé le sens et la portée de l’idée socialiste, aux yeux des classes moyennes chiliennes, au nom d’un pseudo « système de bien-être », stigmatisant l’idée d’une lutte des classes au profit d’une entente cordiale entre celles-ci. Ce capitalisme qui ne dit pas son nom a gangrené tout changement économique et sociale en faveur du peuple qui, aujourd’hui, n’a plus accès ni au travail, ni à l’éducation, ni à la santé ni au logement.

Selon les forces de la gauche progressiste au Chili, il faut aujourd’hui un front unitaire lavé de toute ambiguïté quant à son opposition au système néolibéral, basé sur des force politiques et sociales, des mouvements populaires et progressistes et visant une Assemblée Constituante. L’ex candidat, chef de file du parti « Juntos Podemos », Jorge Arrate, considère cette élection comme « la dernière erreur de la coalition », « Il y eut un processus de détérioration progressive au sein même de la Concertation », a-t-il ajouté au lendemain de l’élection dans un communiqué [2].

Tandis que selon le président Piñera : « aujourd’hui est un grand jour pour le Chili. Aujourd’hui une grand et claire majorité d’hommes et de femmes libres ont opté pour le changement, l’avenir et l’espérance », s’est-il exprimé devant l’hôtel Crown Plaza sur l’Alameda. Une majorité ? Environ 8 millions de votants sur une population de plus de 16 millions pour être plus exact. Puis il a fini son discours en remerciant « Dieu de nous avoir donné un pays aussi beau » ainsi que (ça ne s’invente pas)... la Concertation.

Il ne fallut pas plus de deux jours au nouveau président chilien pour montrer de quoi sera faite la politique chilienne durant son mandat. En effet, le 19 janvier, les grands patrons chiliens sont sortis satisfaits des propos tenus par S. Piñera, celui-ci laissait présager la possibilité d’une révision du salaire minimum pour les 18-21 ans ainsi qu’ une baisse des indemnités chômage [3].

Ce qui pourrait fort bien ressembler à l’ironie du sort est ressenti par le peuple chilien comme une véritable tragédie grotesque dont le « patron-président » serait le héros picaresque, triomphant dans sa médiocrité, appelant celui qu’il considère comme son modèle, le « très démocrate » A. Uribe, à l’aider dans sa tâche, une fois de plus dans la bienveillance générale des grands médias internationaux et la colère d’un peuple déjà rompu au combat et toujours debout.




Notes
[1] http://www.rebelion.org/noticia.php....

[2] http://www.cronica.cl/noticias/site....

[3] http://www.rebelioncorp.org/cl/view....

Equateur - quand un peuple affronte en justice un géant pétrolier

A deus semaines du contre-sommet de Cochabamba (Bolivie)...

Après l’annonce en 2009 par le président de l’Équateur, Rafael Correa, de la possibilité, à certaines conditions, de cesser la production de pétrole dans le pays « pour le bien de l’humanité », un autre pas, judiciaire celui-ci, va sans doute être franchi.

L’Équateur est sur le point de connaître un moment sans précédent dans le combat écologique par l’imminence d’un verdict qui fera date. Les multinationale états-unienne Texaco et Chevron Corporation sont, en effet, conduites depuis 2003 devant les tribunaux par les organisations et populations indigènes de l’Amazonie équatoriale, pour avoir déversé des millions de tonnes de déchets toxiques dans la forêt Amazonienne entre 1964 et 1990 [1].

Texaco a opéré sur un territoire de 1.500.000 Ha où vivaient plusieurs communautés indigènes. Ces populations souffrent aujourd’hui d’un taux anormalement élevé de cancer, ont vu apparaître des malformations chez les nouveau-nés, ils ont donc été contraints de quitter leurs terre et d’abandonner leurs foyers traditionnels. La catastrophe engendrée par l’exploitation et la production de pétrole par Texaco jusqu’en 1992 est déjà surnommée le « Tchernobyl amazonien » par bon nombre d’ONG. Elle est accusée d’avoir utilisé des procédés expressément interdits par la législation en vigueur au Texas depuis 1919 et en Louisiane depuis 1953 considérant l’Équateur du Président de l’époque, Ramón Castro Jirón, comme une zone de non droit. Mais la multinationale a aussi violé la Loi équatorienne sur les hydrocarbures de 1971 qui prévoyait « l’adoption de toutes les mesures nécessaires pour la protection de la faune, de la flore et d’autres ressources naturelles et pour éviter la pollution de l’eau, de l’air et des sols ».

Pendant tout cette période, la transnationale a décidé que, pour optimiser ses bénéfices, elle n’utiliserait pas les techniques environnementales standards de l’époque qui consistaient à réinjecter dans les sous-sols les eaux de formation et les déchets toxiques qui remontent inévitablement lors du processus de perforation. En fait, Texaco a déversé l’eau de formation qui contient des produits chimiques toxiques et cancérigènes à la surface.

Ce comportement a parsemé la forêt de centaines de mares toxiques, sans aucun filtres ni système d’imperméabilisation, a pollué les rivières de plomb et autres métaux lourds sans se préoccuper des populations autochtones. La quantité totale de pétrole rejetée dans les eaux fluviales autant par négligence qu’inconscience est estimée à 64 millions de litres [2].

Depuis la fusion puis le rachat par l’entreprise pétrolière Chevron, Texaco est devenue une des entreprises privées les plus puissantes du monde, la deuxième après Exxon Mobil dont l’influence sur le gouvernement états-unien s’est faite par l’entremise de l’ancienne conseillère à la sécurité nationale, Condoleezza Rice, qui avait fait partie du comité directeur de l’entreprise.

C’est en mai 2003, 10 ans après la première plainte déposée contre Texaco, que l’entreprise Chevron [3] a dû se soumettre à la justice équatorienne, à Lago Agrío, et en répondre à plus de 80 communautés touchés par cette catastrophe qui n’a rien de naturelle dont 30.000 victimes. Depuis lors, les parties civiles demandent la réparation de la zone affectée qui s’élèveraient selon des experts internationaux à plus de 6 milliards de dollars. Le géant pétrolier réplique qu’il a déjà procédé entre 1996 et 1998 à la réhabilitation de cette zone, ce qui a été démenti par des prélèvements effectués par la suite.

Les conséquences de ses agissements sont de plus en plus connues et les manœuvres dilatoires des accusés rendent leur défense grotesque. Le pouvoir, l’influence et la richesse de Texaco et de Chevron n’ont pas suffit à redorer leur blason, de fait, les impacts sur l’environnement et les témoignages de paysans et indigènes sont diffusés depuis quelques années sur des chaînes de télévision nationale et internationale, dans les médias alternatifs mais aussi officiels [4].

Voyant poindre la défaite à l’horizon, le géant pétrolier Chevron a lancé une ultime campagne de lobbying agressif pour faire échouer la procédure judiciaire et, accessoirement, pour éviter de payer les 27000 millions de dollars d’indemnisation. Le Président Rafael Correa a formellement dénoncé cette manœuvre :

« La multinationale Chevron, en désespoir de cause, a tenté récemment d’annuler le procès en diffusant des vidéos où l’on voit des représentants du gouvernement demander des pot-de-vin » [5].

La multinationale dénonce, elle, un complot entre le juge chargé de l’affaire, Juan Nuñez, des représentants du gouvernement et des membres du parti Alianza País. Ces accusations sont monnaie courante en Amérique latine. Faute d’argument, la calomnie est le dernier recours des coupables et le nouveau PDG de Chevron semble vouloir reprendre le flambeau de ce déni de justice. Il répond par la fuite devant ses responsabilités dans cette catastrophe écologique et humaine.

Si la justice équatorienne venait à condamner Chevron, ce serait la preuve qu’une entreprise transnationale peut être conduite devant les tribunaux d’un autre pays que celui où elle réside, et l’Équateur deviendrait le premier pays d’Amérique latine à forcer une compagnie transnationale à comparaître devant ses tribunaux [6].

S’il est indéniable que la Constitution de l’Équateur est l’une des plus écologistes au monde, elle défend plus généralement le droit à la vie et les droits du peuple à disposer de lui-même. Ce qui se joue dans ce procès est fondamental car c’est bien de la souveraineté populaire qu’il s’agit et la condamnation de Chevron Corporation pourrait bien en signer une victoire. La peur qui tenait les populations touchées par cette pollution semble avoir enfin changé de camp.



Notes
[1] À l’origine de cette mobilisation se trouvent des Organisations de défense des droits environnementaux et humains, entre autres Amazon Watch, Rainforest, Action Network.

[2] http://www.ecologiablog.com/post/12....

[3] La multinationale Chevron Corporation a racheté Texaco en 2001.

[4] http://chevrontoxico.com/.

[5] http://www.hoy.com.ec/noticias-ecua....

[6] http://www.texacotoxico.org/.

samedi 26 septembre 2009

HONDURAS - Une démocratie braquée

Le coup d’État survenu le 28 juin 2009. est révélateur à bien des égards d’une tension permanente au sein des démocraties latino-américaines.

Mais le moins que l’on puisse dire c’est que la situation en Amérique Latine et le sort des peuples indigènes ne sont pas les priorités ni le point focal des journaux occidentaux. Grand bien leur fasse, car la façon qu’ils ont de traiter ce genre de sujet en dit long sur leurs méthodes de manipulation de l’information et les desservirait plutôt. Y allant tantôt de leur semblant d’analyse en regardant par le petit bout de la lorgnette tantôt transformant à tel point la vérité que l’on nage en plein mensonge, on peine à croire que leurs lecteurs goûtent encore de cette soupe froide. Aux lecteurs la nausée, Aux médias les mains sales.

Ainsi pouvait-on lire dans le Libération du 28/06/09 :

« Il avait convoqué les électeurs ce dimanche pour ouvrir la voie à une révision de la constitution qui lui permettrait de briguer un deuxième mandat le 29 novembre »

Tout d’abord, il ne s’agissait pas d’un référendum mais d’une consultation populaire (conformément à l’article 2 de la constitution) [1] s’appuyant sur 400 000 signatures sans portée contraignante. Ensuite, elle proposait la possibilité d’ajouter une quatrième urne aux élections générales qui auront lieu le 29 novembre 2009, en toute logique M. Zelaya n’aurait donc pas pu se présenter aux prochaines élections. Il n’était pas ici question pour Manuel Zelaya de « briguer un second mandat » mais de prévoir un référendum pour qu’une nouvelle constitution permettant la mise en place des réformes sociales nécessaires.

Cette décision politique s’inscrit en droite ligne de ce qui a été fait en Bolivie, en Équateur, au Venezuela et connaît les mêmes revers, rappelons seulement le coup d’État de 2002 au Venezuela et la tentative de coup d’État en Bolivie en 2008. Au Honduras, tous les dispositifs institutionnels ont crié haro sur le président Zelaya, le Congrès s’est empressé d’ordonner la destitution du président et la Cour Suprême, ayant validé le coup d’État, a donné l’ordre de séquestration et d’expulsion.

Qu’est ce qu’un golpe militar ?

C’est quatre commandos d’environ 200 soldats qui forcent la porte d’un président démocratiquement élu et lui arrache toute légitimité, non pas seulement en le contraignant à l’exil, mais en le séquestrant, en le réduisant au silence.

Ces méthodes de choc bien connues de l’école de Chicago de Milton Friedman, à Negroponte en passant par les écoles de contre-guérilla instiguées par la CIA nous rappelle que le Honduras, fort de sa base militaire nord-américaine, fut un temps le bastion des contras pour « desti-tuer » le président Sandino au Nicaragua.

Mais un coup d’État n’est pas à considéré comme une fin, il est ourdi bien avant l’intervention des militaires, l’appui d’une partie de l’Église, du patronat et des médias nationaux ne vient pas a posteriori, il en est un des creusets. La fausse lettre de démission de Zelaya, lue devant le congrès pour démobiliser les populations et relayée sans vérifications par CNN, est une démonstration de la guerre psychologique qui se livre avant, pendant et après le coup d’État et qui vise tous les secteurs de la société.

Le président M. Zelaya a déçu sa formation politique (Parti libéral) car une fois élu en 2005, désœuvré par l’indifférence des États-Unis à son égard, il a perçu l’urgence d’impulser un nouvel élan à gauche et s’est inscrit en plein dans la renaissance du bolivarisme en se rapprochant des gauches radicales d’Amérique Latine pour sortir d’une situation économique effrayante (70% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté). Le Honduras est entré dans la coopération économique en ressources pétrolières Pétrocaríbe, brisant ainsi deux siècles de monopole des multinationales et de l’oligarchie, il s’est ensuite allié à L’Alba (l’Alternative Bolivariennes des Amériques initié par H. Chávez et visant l’intégration latino-américaine), rompant ainsi avec la dépendance économique face aux États-Unis.

Dès lors, son courage a suscité de vives réactions dans l’opposition qui voyait d’un très mauvais œil une démocratie qui ne serait pas que formelle, une économie qui ébranlerait les racines de l’oligarchie et une politique sociale supposant une campagne d’alphabétisation, des droits d’accès aux soins et d’une réforme agraire.

Les médias ont tôt fait de classer le coup d’état du 28 juin dans la catégorie « faits divers », bien moins important que le crash d’un avion où le décès d’un chanteur, le considérant comme un événement sans raisons ni fin, basant toute analyse sur le fait dans sa ponctualité, dans sa fulgurance alors qu’un coup d’État est rien moins qu’un processus. Le coup d’État est bien encore là, il croît par cercles concentriques comme l’onde de choc d’un pavé dans la mare, il est partout où croupissent des prisonniers politiques, il est dans la répression sanglante de la lutte du peuple hondurien, des syndicalistes, des étudiants.

Nous devons saluer le courageux combat que mène en ce moment même le peuple du Honduras, le dimanche 5/07/09, des milliers d’hommes ont marché pendant 6 heures vers l’aéroport de Tegucigalpa pour manifester leur soutien au retour de Manual Zelaya mais en vain. Les militaires, sous commandement express de Micheletti [2] (désigné président provisoire) ont empêché l’avion dans lequel se trouvait Zelaya d’atterrir et ont réprimé violemment les manifestants.

Parmi les résistants, beaucoup appellent à une fédération des forces syndicales, des organisations ouvrières et paysannes du Honduras et des pays voisins pour une grève générale, seule capable d’enrayer l’installation de la dictature militaire. D’autres, comme le président Chávez, pense qu’il faut démobiliser les bases des force armées et les appeler à désobéir aux ordres, à pointer leurs armes non contre leurs frères mais contre l’oligarchie.

Ce qui est certain, c’est qu’une solidarité internationale est indispensable au rétablissement de la démocratie au Honduras pour que soit respectée la souveraineté du peuple, pour que cessent les ignominies perpétrés par le pouvoir en place. Ne rien relâcher de notre vigilance, informer sur l’évolution de la situation. Nous devons faire honneur au courage d’un peuple en lutte en prenant à revers, tant que nous le pourrons, les pouvoirs politiques européens qui ont, eux aussi, une drôle d’idée de la démocratie (cf. le mini-traité européen).

Il ne faut pas compter sur l’intervention états-unienne pour le retour de M. Zelaya au Honduras, tout simplement parce qu’après un siècle de domination économique (avec l’United Fruit Company) et après y avoir installé une solide oligarchie militaro-industrielle, le coup d’État, étrangement, ne vient qu’ institutionnaliser un état de fait et empêcher un virage à gauche nuisible aux intérêts économiques des États-Unis, la timidité dont B. Obama fait preuve pour condamner le coup d’État est regrettable sinon suspecte.

Mais en France comme ailleurs, ont lieu des rassemblements pour témoigner de leur solidarité avec le peuple et partant avec le président M. Zelaya, des associations, des formations politiques et des comités de soutien répondent « presente », comme ici le jeudi 02 juillet :




Il ne faut compter que sur la capacité des forces de gauche internationales pour faire le contrepoint à la fabrication d’une histoire officielle, sur la solidarité internationale pour empêcher la répétition de l’Histoire.

Cependant, Le coup d’État est à considérer comme plusieurs signaux d’alarme retentissant d’un seul coup car si Zelaya revenait, ce qui serait en soi une victoire d’un point de vue symbolique, le combat devrait continuer. La diffusion de l’information et les témoignages de solidarité aux peuples en lutte devraient se poursuivre et s’étendre pour que les démocraties formelles du Chili, du Pérou, d’Argentine et d’ailleurs retombent dans leurs propres plis, pour que ces nouveaux visages de l’oppression des peuples latino-américains tombent enfin les masques.

lundi 6 juillet 2009

ETAT D’ALERTE A LA DEMOCRATIE

MANIFESTATION

Mercredi 8 Juillet de 18H à 21H,

Place de la République,

M° République



Après la répression menée par le gouvernement d’Alan Garcia du mouvement des Peuples originaires de l’Amazonie au Pérou, c’est le Honduras qui est devenu le terrain d’un coup d’état militaire, chassant du pouvoir le Président Zelaya démocratiquement élu.

Dans les 2 cas, le peuple se voit privé de ses droits, ses choix ne sont pas reconnus ; certains payent de leur vie, d’autres de leur liberté, l’expression de leur refus des options prises par des oligarchies locales, qui n’hésitent pas à s’appuyer sur des polices militaires pour faire accepter les desideratas d’un capitalisme exacerbé en quête de sa survie et de celles des élites au détriment des peuples, quitte à privilégier les solutions à court terme même si elles mettent en péril l’avenir de tous :

Que peut –il résulter de la surexploitation des ressources naturelles ? de la destruction de la forêt amazonienne�� au Pérou? du rétablissement des options agricoles destructrices de l’environnement et de l’économie définies par la United Fruit Company au Honduras ?

Devons-nous attendre d’autres massacres pour commencer à nous poser les vraies questions autour de l’avenir de la démocratie, de la planète, de notre avenir et de celui de nos enfants ?

Allons-nous accepter que les élections et les choix démocratiques n’aient qu’une valeur relative suivant la force et la contrainte qui s’exerceront à leur encontre ?

informacion en vivo

samedi 4 juillet 2009

Coup d'Etat au Honduras

APPEL URGENT SOLIDARITE HONDURAS

LA MOBILISATION CONTINUE !

RASSEMBLEMENT PLACE DE LA FONTAINE ST MICHEL

(Métro St Michel, ligne 4)

DIMANCHE 5 JUILLET DE 16H00 A 18H00


POUR LA DEMOCRATIE PARTICIPATIVE AU HONDURAS !

POUR LE RETOUR du PRESIDENT ZELAYA !



NON A LA BARBARIE DES FORCES MILITAIRES HONDURIENNES !

NON AUX HEURES SOMBRES DE LA DICTATURE !

Dimanche dernier au Honduras s'est produit un coup d’état contre la démocratie. Le Président constitutionnel, Manuel ZELAYA, a été séquestré et expulsé de force par l’armée. Une oligarchie des plus réactionnaires s'est installée depuis au pouvoir, personnifiée par Roberto Micheletti, ancien militaire et puissant homme d'affaires.

Le Peuple, qui s'était soulevé pacifiquement depuis l'enlèvement de son président élu, est réprimé de plus en plus violemment par la police et les militaires. La répression se fait aussi sentir par la censure de la presse nationale et internationale et par l'instauration de la terreur dans la population à travers des couvre-feux et des coupures systématiques de l'électricité, de l'eau potable et des télécommunications.

Nous ne pouvons nous résoudre au retour en Amérique Latine de dictatures militaires déguisées en démocratie, qui tentent d'empêcher les réformes nécessaires au progrès de cette région.

Nous devons tous nous mobiliser pour réaffirmer notre solidarité avec le peuple hondurien qui attend le retour sur le territoire de son président légitime. Nous devons tous exiger la fin de l’état d’urgence, le rétablissement des libertés publiques et du fonctionnement démocratique des institutions.

NB:

L'article 5 de la constitution autorisait Zelaya à proposer une consultation du peuple sur la réélection!

vendredi 26 juin 2009

PÉROU - Le nouveau visage de l’oppression



La CIDH (Comision Interamericana de los Derechos Humanos) est l’une des nombreuses ramifications de l’OEA (Organisation des États américains), tout en dénonçant les « affrontements » (Le Figaro du 06/06/09) ou « les violences » (Libération du 09/06/09) et la mort de paysans à Bagua (Pérou, au nord-est de Lima) survenus le 05 juin 2009, elle en appelle au dialogue. Nous commençons à connaître ce genre de réconciliation des inconciliables. En effet, comment renouer un dialogue qui n’a jamais eu lieu ? Comment en appeler à l’apaisement des colères d’un peuple quand on joue sa vie ? Mais la CIDH a pointé du doigt des tensions et si nous regardons autour de ce qui nous est désigné, apparaît une politique hostile à l’égard du peuple péruvien et un mépris total pour la vie et le travail des paysans indiens.

La politique social-démocrate du président péruvien Alan Garcia, à l’instar de celle de Bachelet au Chili (cf la situation du peuple mapuche) semble bien avoir tombé le masque.

Les paysans ont bloqué la voie d’accès à la ville de Bagua, et ils ont été, selon Alan Garcia, « dispersé » par la police nationale, en réalité, ce fut une curée d’une violence extrême qui s’est terminé par la mort d’une trentaine d’hommes abattus comme des chiens.

Ces « dangereux terroristes » ne faisaient que se révolter contre le pillage et le dépouillement de leurs terres par les transnationales a qui le président a donné carte blanche pour leur installation dans le cadre de l’Accord de libre-échange (TLC en espagnol) avec les États-Unis.

Tandis que l’association toujours poignante des « Mères de la place de mai » en Argentine a rendu hommage au soulèvement indien :

« Nous voulons saluer nos amis péruviens qui en ont eu assez, qui se sont rebellés et ont dit « Basta », comme toujours en y jouant leurs vies. Mais lorsque nous le peuple, nous nous rebellons, même si nous y laissons la vie, le plus souvent, nous savons que nous allons gagner ». Et de conclure à propos d’Alan García et de son gouvernement : « Nous savons bien qui les paye, qui les commande et qui les amène au pouvoir. Hélas, l’empire possède encore de nombreuses mains plongées un peu partout. »

La réaction haineuse de quelques-uns parmi les hommes les plus haut placés du pays s’offusquent, se scandalisent, eux, de ces événements tragiques. Selon le cardinal Juan Luis Cipriani, personnage clef de l’Église Catholique péruvienne et membre de l’Opus Dei, l’objet du scandale est la mort des policiers lors de l’intervention, celui-ci a déclaré au lendemain de ces événements :

« L’Église voit avec une profonde douleur ces événements car nous n’avons affaire ici ni à la défense du peuple, ni à un groupe de natifs, ni au gouvernement, mais à l’Église (...) Jésus Christ n’a jamais appelé à la subversion, il n’a jamais fondé d’ONG qui ne font que poser des problèmes. » [1]

Ces paroles en disent long sur les problématiques qui persistent au Pérou, elles nous rappellent que ce même cardinal a toujours défendu le « dictateur en cavale » Fujimori qui, lui non plus n’a jamais compris la « nécessité » des révoltes du peuple, en témoigne son « Gouvernement d’urgence et de reconstruction nationale » initié en 1992.

Tandis que l’ONU parle de « massacre », le leader indien Alberto Pizango parle lui de « génocide » car, explique-t-il, « On a déjà tué mes frères » [2]

Alan Garcia apparaît comme faisant partie de la mouvance politique centre-gauche, orateur talentueux, il a réussi à se faire réélire en 2006, tout juste 20 ans après le massacre de 47 paysans à Accomarca lors de son premier mandat sans avoir été poursuivi, la prescription ayant joué en sa faveur.

Ce succédané de démocratie applique l’inacceptable « tolérance zéro » à l’égard de tous ceux qui sont susceptibles de freiner la manne pétrolière. Cet acharnement dans l’ouverture des marchés et dans la répression fait couler beaucoup plus de sang que de pétrole. Bien que les discriminations raciales à l’égard du peuple indigène ne soient pas nouvelles et ne soient qu’un relent du système colonial, le fait est qu’aujourd’hui, le masque de la démocratie et le silence des médias occidentaux dissimulent sournoisement une situation des plus terribles.

L’un des héritiers du Parti unifié mariateguiste, Javier Diez Canseco, explique dans un article publié dans La República du 08/06/2009 :

« Avec les dispositions législatives que le Congrès lui a déléguées pour “adapter la législation à l’Accord de libre-échange avec les États-Unis”, sans scrupules et manœuvrier, il a cru trouver l’occasion d’imposer sa vision révélée. Il a lancé une offensive contre les communautés et l’Amazonie avec des décrets législatifs (DL) sans consultation (en violant la Convention 169 de l’OIT et d’autres) et a donc provoqué la réaction des peuples d’Amazonie. »

L’Association interethnique pour le développement de l’Amazonie péruvienne (AIDESEP) dont Alberto Pizango est le leader est qualifiée sans vergogne d’ « organisation terroriste » mais nous sommes pourtant loin, très loin de la guérilla révolutionnaire du « Sentier lumineux ». Il s’agit pour eux d’empêcher le bradage et le découpage des terres d’Amazonie en attirant, de façon pacifique, les projecteurs internationaux.

Des terroristes ? Non, des manifestants, des résistants sans armes, avec pour seul défense, du courage et des cailloux face aux véhicules blindés et aux hélicoptères de l’armée.

Une démocratie ? Oui, si l’on peut qualifier ainsi, en continuant de dormir sur nos deux oreilles, un régime qui perpétue ces violations des droits humains, qui refuse de reconnaître l’identité indienne, qui dépouille les mineurs, les paysans, et les défait de leurs droits à la vie même.

Il faut continuer de parler de ces hommes à qui l’on réserve un sort de chien parce que cette déliquescence de l’idée de démocratie sous-tend la question de la métamorphose de l’autoritarisme contemporain, de voir le nouveau visage que peuvent prendre les dérives du pouvoir, d’où qu’elles viennent, où qu’elles aillent.

Tout est là. Le masque grimaçant, le silence crispée de l’Histoire qui nous pèse dessus l’échine et la rafale, presque habituelle, qui vient coucher des hommes encore un peu debout.

http://www.flickr.com/photos/rue89/sets/72157620353368234/show/

[1] Voir

[2] Voir